LA VIOLENCE - Insaisissables, les Black Blocks effraient et fascinent (02/06/2003)
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Photo Laurent Guiraud
A Genève, les altermondialistes ont à nouveau souffert de leur présence.
JOSE CARRON
Autant que la menace terroriste dont les autorités se prévalent pour sécuriser à outrance les sommets rassemblant les chefs d'Etat, les Black Blocks sont à l'origine des vastes déploiements de forces qui transforment toute une région en état policier, l'espace d'une semaine ou deux. Masqués, insaisissables, violents, déterminés, les membres de "ce nouveau courant alternatif, issu de la mouvance libertaire" tels que les définissent les observateurs, effraient et fascinent. Surtout ils troublent le message que souhaitent transmettre les tenants de l'altermondialisation, ne serait-ce parce qu'en se greffant aux manifestations anti G8, ils favorisent et légitiment tous les amalgames.
Genève, Annemasse et Lausanne n'ont pas échappé au phénomène à l'occasion du G8 d'Evian et d'aucuns pourront regretter que dans six mois, une année ou cinq ans, le 1er juin 2003 ne reste dans les mémoires qu'à travers le saccage des Rues-Basses et les affrontements avec la police. Comme le Sommet de Gênes reste celui où les altermondialistes ont enregistré leur première victime et où la présence des Black Blocks avait fourni à la police italienne l'occasion de se livrer à des provocations.
Apparus pour la première fois en tant que tels à Seattle lors d'une manifestation contre l'OMC (Organisation mondiale du commerce), les Black Blocks affichent des objectifs clairement définis qui tranchent avec la manière dont ils se comportent sur le terrain. Ils souhaitent entre autres "apporter une radicalité au mouvement altermondialiste en y intégrant la violence offensive et défensive contre les forces policières des Etats bourgeois" et proposer "un nouveau cadre aux militants en dehors des partis et des organisations politiques traditionnels". Le tout basé sur un mode d'organisation "horizontal, fluide et évolutif".
Pas les mêmes samedi
Combien étaient-ils samedi et dimanche à Genève? Plusieurs dizaines sans doute. Moins qu'ils ne l'espéraient, mais suffisamment pour faire preuve d'"efficacité" aux côtés de ceux dont ils raillent "le réformisme citoyen". Un réformisme qui ne permet pas, selon eux, de s'affranchir "de la régulation du capitalisme", telle que la prônent les ONG et les dirigeants d'Attac. Très présents hier lors du blocage des ponts interdisant toute circulation entre les rives droite et gauche de Genève, les Black Blocks ou supposés tels, croisés autour des éphémères barricades dressées au pont de la Coulouvrenière ou sur le pont de l'Ile, s'exprimaient en allemand et en italien. En revanche, plusieurs témoins ont observé que les casseurs de samedi soir communiquaient en français, ce qui tendrait à prouver que ce ne sont pas les mêmes et que les bris de vitrines et les incendies perpétrés rue du Rhône et dans le quartier de la Jonction puissent être le fait d'anarchistes de la région, voire lyonnais.
Version "politique" des hooligans?
Certains jugent que l'argumentation développée sur les sites internet pouvant être assimilés aux Black Blocks ou à la mouvance anarcho-libertaire est particulièrement faible et que ces gens ne sont en fait que les "héritiers" d'une violence qui a toujours accompagné les grandes manifestations protestataires. "Casse et vandalisme sont leurs seules motivations", résumait hier un altermondialiste de bonne foi, écoeuré par les affrontements auxquels a donné lieu la manifestation anti-G8 franco-suisse. Le même ajoutait sur le ton de la colère: "Ce ne sont que de petits cons venus pour s'amuser en cassant des vitrines." Les Black Blocks ne seraient-ils que la version "politique" des hooligans pour qui le football n'est qu'un prétexte? Et que dire de ces témoignages qui rapportent que l'accoutrement vestimentaire de certains "cagoulés" trahit parfois des sympathies politiques à l'opposé de l'ultragauche? Insaisissables, les Black Blocks ne le sont pas seulement pour les policiers...
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