LA MANIF - La grande partie d'échecs des forces de l'ordre (02/06/2003)
La police boucle la Vieille-Ville pour installer son quartier général.
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VALÉRIE DUBY

"La gestion de manifestation? C'est un peu comme un grand jeu d'échecs où l'on avance des pièces", sourit le capitaine. Pour des raisons de sécurité, l'homme ne veut pas que son nom apparaisse dans nos colonnes. Aussi, l'appellerons-nous le capitaine Lima, de son nom de code. Comme la plupart des policiers engagés dans l'opération, le capitaine Lima a peu dormi durant la nuit de samedi à dimanche. Le rendez-vous avec ses hommes a eu lieu à l'aube à la caserne des Vernets. Direction: la Vieille-Ville, où ont été installés onze barrages filtrants. Après des années de maintien de l'ordre sur le terrain, le capitaine dirige pour la première fois près de 500 hommes depuis son camion. Un poste de commandement (PC) mobile qui, hier toute la journée, est resté stationné sur la place du Bourg-de-Four.

Les noms des escadrons engagés Pedro, Aligros, Renard, etc. ont été choisis par les policiers. A l'initiative du capitaine Lima, qui travaille simultanément avec radios et téléphones portables, les forces de l'ordre genevoises et confédérées sont déplacées de site en site. "Nous recevons les ordres du PC, explique-t-il. Ici, les informations qui nous parviennent doivent toutes être vérifiées. Raison pour laquelle nous parlons souvent au conditionnel."

Une stratégie à observer

Comme prévu, la police genevoise applique sa stratégie: se montrer le moins visible possible. Comme prévu également, le souci des forces de l'ordre, ce sont surtout les Black Blocks. "Des jeunes extrêmement bien organisés et très mobiles qui, une fois leur foulard ou leur cagoule enlevés, ressemblent à n'importe quel jeune, explique un gendarme. C'est l'une des raisons pour lesquelles il est très difficile de les interpeller."

Dans la Vieille-Ville, les heures s'égrènent. Lentement. Peu après midi, sous un soleil de plomb, quelques gendarmes prennent un peu de repos. Pendant ce temps, au rythme des différentes interventions radio, le capitaine Lima poursuit sa partie d'échecs. Question: pourquoi la police n'a-t-elle effectué aucune arrestation durant la première nuit d'émeutes? "Nous étions en place, explique le capitaine Lima. Et pour les ordres, il faut voir avec l'étage supérieur." Comprenez la hiérarchie en place pour l'occasion et... les politiques. Le ton s'est toutefois durci hier après-midi puisque la police n'a pas hésité à utiliser les lacrymogènes pour dissiper les manifestants qui tiraient des pierres dans sa direction.

Le ton se durcit

C'est en milieu d'après-midi, au retour de la manifestation en ville de Genève, que la tension monte d'un cran. D'un seul coup, tous les gendarmes se saisissent de l'équipement pesant près de 20 kilos dont ils s'étaient délestés durant l'accalmie. Ils sont prêts à intervenir. Le calme du capitaine Lima tranche avec l'effervescence qui s'empare soudain de la ville. Depuis sa fourgonnette qui fait office de QG, il demande confirmation des informations qui lui sont livrées et il procède aux modifications de son dispositif.

Pour le capitaine comme pour ses hommes, la nuit dimanche à lundi s'annonçait courte. Malgré l'arrivée des 300 gendarmes allemands, initialement confinés à Cointrin, et venus leur prêter main-forte. Tous espéraient la pluie. Car la pluie, "c'est encore le meilleur ami du gendarme", assure le capitaine Lima.


La police joue la transparence

V.Dy

Pénétrer dans le lieu où sont prises toutes les décisions liées aux événements du week-end? Une première pour les journalistes qui ont ainsi pu visiter le Poste de commandement, au nouvel Hôtel de police des Acacias. Autour d'une table sont réunies toutes les personnes s'occupant de la sécurité: la police bien sûr, mais aussi les pompiers, l'armée, la sécurité civile, notamment. Ici, interdiction de manger ou de boire. Question de discipline. "Lorsque le PC est au complet, cela représente une quarantaine de personnes. Il faut éviter le souk", glisse Eric Grandjean, porte-parole de la police genevoise.

Pour la première fois depuis que son règlement d'application est entré en vigueur en février dernier, le plan Osiris a été mis sur pied, hier. Il s'agit du plan actionné pour tous les événements d'ordre exceptionnel.


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