CHOC ET STRATEGIE - Les altermondialistes refusent le piège des groupuscules violents (02/06/2003)
http://www.tribune.ch/accueil/dossiers/titre_dossier/article/index.php?Page_ID=5340&article_ID=16447Autorités et organisateurs jugent que les casseurs sont étrangers au mouvement.
ERIC BUDRY
La casse spectaculaire de samedi soir et les quelques dégâts commis durant la grande manifestation vont-ils décrédibiliser le mouvement altermondialiste aux yeux des Genevois? Pour le Forum social lémanique (FSL) ce serait une catastrophe. Le comité d'organisation de la manifestation de dimanche, qui regroupe différentes associations, estime en effet que cette dernière a été un grand succès, tant par le nombre de manifestants (100 000 en tout selon lui, la moitié selon la police) que par sa tenue générale.
Juan Tortosa, l'un des coordinateurs du FSL, souhaite que les Genevois fassent la part des choses: "Nous condamnons fermement ce type d'actions violentes totalement étrangères au mouvement altermondialiste.J'espère que les médias et la population feront une distinction claire entre ces gens et nous. Ils étaient 300, nous étions hier 100 000 à défiler pacifiquement."
Questionné hier à 17 heures, Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat, séparait, lui, nettement le bon grain de l'ivraie. "Pour ce qui est de la manifestation elle-même, il est difficile de reprocher quelque chose aux organisateurs, expliquait-il. Ils ont tenu les accords que nous avions convenus avec eux. Mais ils ont été confrontés à des gens qui utilisent ce type d'événements à leurs propres fins. C'est un phénomène similaire à celui des hooligans."
Extrême droite impliquée?
Les rumeurs allaient bon train hier, particulièrement en ce qui concerne le commando de choc qui a dévasté les Rues-Basses dans la nuit de samedi à dimanche. Elles évoquent une opération de l'extrême droite. "Oui, nous avons effectivement quelques soupçons, admet Juan Tortosa. Des camarades italiens ont reconnu des personnes liées à l'extrême droite en Italie et en Allemagne."
Si le député écologiste Antonio Hodgers est plus prudent, il rappelle tout de même le cas de Gênes où la présence d'éléments provocateurs fascistes a finalement été prouvée. Ce qui est absolument certain pour l'élu, c'est que "la casse a constitué un acte politique délibéré pour décrédibiliser un mouvement pacifique la nuit avant la grande manifestation". "Les dégâts sont absolument regrettables pour les commerçants, déplore-t-il. Mais c'est le mouvement qui était le premier visé et qui risque de le payer chèrement d'une autre manière."
Pas les mêmes
Au vu du professionnalisme et de l'équipement du commando nocturne, l'écologiste est du reste persuadé que le groupe a disparu de la circulation depuis. "Ce ne sont pas du tout les mêmes que ceux avec qui nous avons eu des problèmes dans la manif, explique-t-il. Ces derniers font davantage partie des jeunes excités habituels. Nous avons pu empêcher, en prenant des risques physiques, qu'ils s'attaquent à une poste. Pour le reste, les dégâts étaient relativement ciblés et heureusement pas trop importants."
Après ces deux catégories de casseurs, un troisième type est apparu en fin d'après-midi dans les rues: les occasionnels qui profitent des débordements pour s'offrir quelques décharges d'adrénaline. Ils composaient visiblement une bonne partie de ceux qui jouaient au chat et à la souris avec la police hier en début de soirée.
"Des délinquants"
Le changement de ton depuis la fin de la manif du Conseil d'Etat et des responsables de la police à propos de ces différents casseurs est en tout cas spectaculaire. "L'écrasante majorité des manifestants a défilé dans le calme et l'ordre, a ainsi reconnu Laurent Moutinot. En revanche, la mise à sac du centre-ville par des groupuscules extrémistes dans la nuit de samedi à dimanche ne saurait se répéter."
Sur le coup de 17 heures dimanche, le président du Conseil d'Etat confirmait que la police serait désormais très visible en ville. Ce qu'elle a été. "Nous entendons qu'un maximum de fauteurs de troubles soit arrêté. Ce sont des délinquants et ils doivent être traités comme tel", a-t-il conclu sur un ton martial qui lui est pour le moins inhabituel.
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