Le Forum social lémanique dénonce la provocation policière
Paru le : 3 juin 2003 http://www.lecourrier.ch/Selection/sel2003_458.htmANTI-G8 · Le Forum social lémanique reproche à la police le non-respect du principe de discrétion lors des événements de dimanche soir. Micheline Spoerri répond en annonçant un durcissement de l'encadrement policier.
VIRGINIE POYETTON
Les organisateurs de la manifestation anti-G8 sont inquiets: le Sommet d'Evian n'est pas encore terminé, de nouveaux débordements sont encore possibles et la police ne semble pas vouloir calmer le jeu. Réuni hier lors d'une conférence de presse, le Forum social lémanique (FSL) dénonçait l'attitude provocatrice de la police à l'égard des organisateurs et des manifestants ces derniers jours.
« Micheline Spoerri a utilisé les événements de la nuit de samedi pour reprendre la main et revoir les accords négociés avec la police », commente Eric Decarro, membre du FSL. En effet, la conseillère d'Etat en charge du Département de justice, police et sécurité s'est ouvertement appuyée sur la casse perpétrée par des groupuscules, samedi soir, pour dénoncer la promesse de discrétion négociée avec le FSL.
FORME D'EXPRESSION
« Nous dénonçons ce changement d'orientation de la police. Il s'agit d'une pure provocation à l'égard des manifestants qui rentraient tranquillement de la manifestation par la route de Malagnou. La police les a bloqué à la hauteur du Muséum et a chargé des manifestants qui descendaient. Elle porte une lourde responsabilité dans le déroulement des événements », conclut M. Decarro. Pour Marie-Eve Tejedor, membre du FSL, les moments où la mobilisation s'est le mieux déroulée sont ceux où la police était quasi invisible. « Quand la police devient plus présente, elle est ressentie comme une provocation et entraîne forcément des réactions. » Pour les organisateurs, la violence a essentiellement deux origines: la provocation policière et le besoin de nombreux jeunes de se confronter à la police. « Il existe aujourd'hui une telle violence dans les rapports sociaux qu'une des formes d'expression de la jeunesse devient la confrontation aux forces de l'ordre en tant que symbole de la contrainte sociale », analyse Olivier de Marcellus, membre du FSL.
PRÉSENCE MUSCLÉE
De son côté, la conseillère d'Etat se défend de tout dérapage policier et soutient que la police a accompli un travail remarquable, à la hauteur de la tradition humaniste genevoise. Sans vouloir désigner un responsable particulier et tout en dénonçant le non-respect du FSL des accords passés lors des blocages de ponts dimanche matin, Mme Spoerri dénonce le double langage tenu par les manifestants. Selon elle, la présence policière est à la fois critiquée et recherchée. « C'est un double discours que l'on trouve dans l'évolution sociale. » Dans un autre domaine, Micheline Spoerri estime désormais nécessaire « un examen de conscience » des manifestants qui auraient « complaisamment joué le rôle de tampon entre les casseurs et la police, entravant ainsi le maintien de l'ordre. »
Christian Cudré-Mauroux, chef de la police ad intérim, soutient de son côté que les difficultés rencontrées par la police étaient réelles. La vitesse d'exécution et l'effet massif des actions simultanées des casseurs dans la nuit de samedi à dimanche n'étaient pas gérables avec les forces disponibles; et l'effet de masse de la manifestation de dimanche a empêché une intervention rapide, malgré la présence des policiers allemands. En conclusion, la cheffe du DJPS annonce un revirement de la stratégie policière, légitimé, selon elle, par l'échec de la politique de discrétion menée durant le week-end. « Nous sommes aujourd'hui confrontés à une situation nouvelle où la destruction des commerces n'est plus simplement un effet induit, mais un but en soi. » La nouvelle présence policière sera visible, musclée et prête à l'engagement. « Rester à un certain niveau de discrétion n'est plus de mise. Nous ferons des sommations et agirons de manière plus énergique », résume Christian Cudré-Mauroux.
USINE, POLICE ET VILLAGE
L'accusation portée par le FSL à l'encontre de la police ne se résume pas aux événements du samedi après-midi. Les organisateurs dénoncent également la descente à l'Usine d'une trentaine de policiers en civil dans la nuit de dimanche à lundi. Descente que Mme Spoerri avait annoncée deux heures auparavant au journal télévisé de 19h30, sur la TSR (lire ci-dessous).
Le FSL estime par ailleurs que l'engagement de la police allemande s'est fait sans égards aux accords passés avec les organisateurs, dont les forces de l'ordre allemandes ne connaissaient d'ailleurs pas l'existence. Une personne du service juridique Legal team se serait ainsi fait matraquer par un policier.
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