« La permanence juridique G8 a été empêchée d'agir »
Paru le : 5 juin 2003 http://www.lecourrier.ch/Selection/sel2003_471.htm

DÉRAPAGES · Les membres du Legal Team accusent la police de les avoir écartés des manifestations, parfois très violemment, pour les empêcher de jouer leur rôle d'observateurs neutres et de conseillers juridiques des personnes victimes de violences.

PHILIPPE CHEVALIER

Censés rendre compte du déroulement des manifestations anti-G8 et de l'attitude de la police, des membres de l'équipe juridique Legal Team (LT) se sont plaints, hier, d'avoir été eux-mêmes victimes de la « montée en puissance » des forces de l'ordre. Le LT dénonce une « dangereuse autonomisation des forces de police sur le terrain », qui ne respecteraient plus ni les manifestants, ni les curieux, ni les journalistes, ni les observateurs.

Entre dimanche et mardi, la permanence juridique G8 a enregistré une cinquantaine de témoignages de personnes disant avoir subi des violences policières ou, plus rarement, y avoir assisté. Parmi celles-ci, une moitié d'entre elles ont afflué mardi soir lors de l'imposante opération policière menée dans le quartier de Plainpalais contre un petit nombre de manifestants entourés de nombreux badauds.

ÉVITER LES TÉMOINS

Au nom du LT, Stéphanie Lammar a critiqué vertement la décision d'interdire la manifestation de mardi. La situation ne justifiait pas cette « restriction de la liberté d'expression et du droit de réunion », a-t-elle soutenu. D'une part, cette mesure s'est révélée inadéquate puisqu'il était prévisible que la manifestation aurait lieu en dépit de l'interdiction signifiée l'après-midi même pour la soirée. D'autre part, l'action de la police a été, à ses yeux, « disproportionnée ».

Ainsi, le LT rapporte que de nombreuses interpellations ont été menées par des policiers cagoulés ne s'identifiant pas toujours clairement. Ces interpellations auraient été souvent précédées de matraquages en règle et de charges violentes indiscriminées contre la foule. En outre, une partie des personnes arrêtées lors de cette opération auraient été gardées dans les fourgons avec un sac sur la tête. D'autres, détenues au centre de la Gravière auraient, elles, été maintenues à genoux. Elles ont été ensuite relaxées dans la nuit au diable Vauvert, qui à Bardonnex, qui à Chancy, etc.

Mais le plus grave aux yeux du LT, ce sont les entraves mises au travail des médias et des observateurs, démontrant une « tentative d'éviter la présence de témoins ». En plus des brimades que certains ont subies, des photographes et des cameramen se sont souvent fait confisquer ou détruire leur matériel. Quant aux membres du LT, pourtant clairement identifiés par leurs dossards, certains ont été injuriés, molestés et parfois blessés. Mardi, les policiers sur le terrain les auraient avertis qu'ils ne bénéficiaient désormais plus d'aucune immunité et qu'ils seraient traités comme des émeutiers. Et ce en totale contradiction avec les accords passés.

Enfin, le LT et des membres du Forum social lémanique ont dénoncé l'utilisation par la police d'« armes illégales ». Soit des barres de fer (notamment à l'Usine), des gaz lacrymogènes mêlés à l'eau crachée par les autopompes ainsi que des bombes assourdissantes tirées directement contre des personnes. Par téléphone, la police admet uniquement l'utilisation de lacrymogènes, mais nie avoir jamais employé des barres de fer et visé des personnes avec des bombes assourdissantes. Par ailleurs, un communiqué annonce qu'elle a procédé à quarante-huit interpellations mardi soir. Six personnes ont été prévenues d'émeute ou d'opposition aux actes de l'autorité. Une nouvelle fois, la police a regretté le « comportement irresponsable des badauds ».


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