Plainpalais sous état de siège
DOUTE, 03.06.2003 23:13
http://hns.samizdat.net/article.php3?id_article=3162Se trouver subitement entre les mains d'une police schizophrène est une expérience salutaire pour comprendre les situations dramatiques ailleurs dans le monde. C'est ce que vient de vivre le boulevard Carl-Vogt.
Mardi 03 juin, à partir de 18.45... Précédés par le hurlement des sirènes une trentaine de paniers à salade, de voitures banalisées, un canon à eau et des escadrons de voltigeurs à motos déboulent en pourchassant une petite centaine de manifestants TOUS à visage découvert qui se dispersent parmi les gens attablés sur les nombreuses terrasses. Hommes casqués, matraques, boucliers, lances grenandes, le grand jeu...
Entre la rue Dubois-Melly et la rue de l'Ecole de Médecine, 8 fourgons stationnent, avec un nombre indéterminé de voitures banalisées... LEs gens regardent atterrés. Parmi le public sur les trottoirs, nombre d'enfants et de parents inquiets qui essayent de regagner leur domicile mais sont refoulés, avec politesse mais sans appel par les agents...
Quatre motos transportant chacune deux agents en tenue anti-émeutes, le passager armé d'un lance grenade, s'élancent lorsque j'arrive sur le Boulevard Carl-Vogt... PETIT DETAIL : les motos n'avaient pas de plaques d'immatriculation...
Sur le boulevard, scènes dignes des rafles qui ont marqué le 20e siècle : des groupes de policiers casqués poursuivent entre les gens, en les poussant parfois, des jeunes pour délit manifeste de sales gueules (de jeune !). C'est alors que je me rends compte de la présence de motards "civils" qui portent, détail qui tue, des dossards "Police". Toute cette fine équipe remonte en scrutant avec des gueules de truands les gens qui regardent. On les sent nerveux, hargneux, prêts à défoncer n'importe qui. Lorsque tout cet attirail repart sur les chapeaux de roue pour se poster 70 m plus loin (moteurs hurlant à fond, sirène, cris), je remarque alors la troisième catégorie de policiers : des gars en civil, avec cagoule qui remontent par équipes d'une demi-douzaine entre les gens du quartiers abasourdis....
Soudain, le cordon policier qui bloquait l'Ecole de Médecine, sur un ordre hurlé s'ébranle au pas de course (quand même lent et fatigué...) pour charger... les gens rassemblés devant la boulangerie POuly, angle CArl-Vogt/Ecole de Médecine. Les voisins sont bousculés par les boucliers levés, et se réfugient en retrait.
Nouvel ordre hurlé, le cordon de police se retire dans le désordre vers l'école de ma fille, sous les sifflets des gens du quartier excédés par ces procédés.
Tout le long, les radios de police grésillent, les ordres données par le gradés s'échangent :
On progresse ! hurle l'un d'entre eux. Ce n'est pas l'impression qu'ils donnent, la régression est trop patente...
Retour dans le havre de mon immeuble, pour se découvrir vers 21.15 de nouveau cerné par un cordon de police, fourgons arrivant en sens interdit le long de l'avenue du Mail, ordres hurlés intimant à toute personne de rentrer sur le champ....
Quelles conclusions en tirer ?
L'impression dramatique de voir une savante mise en scène montée par certains syndicats de police pour défendre leur magistrate qui, elle mériterait assurément de jouer le pot de fleur...
Tout ce déploiement de force contre une centaine de jeunes manifestants démontre à quel point la magistrate libérale et son état-major n'arrive pas à comprendre qu'il peut y avoir plusieurs catégories de gens dans la rue : des casseurs (ceux-là sont loin, merci, et sans casse pour eux !) des manifestants politiques (ceux là étaient présents et se sont fait traiter comme des criminels) et des gens du quartier terrorisés par ce déployement pathétique de moyens (environ 30 fourgons, une dizaine de voitures banalisées, 20 motos, un canon à eau et un raton laveur).
Si j'avais des doutes sur notre État, ils sont à présent levés : lorsque la magistrate libérale et le procureur (libéral) se donnent la main pour donner la leçon à ces pauvres cloches de gauche (c'est leur opinion), la populace n'a qu'à bien se tenir ! Eh oui, le jour n'est pas encore venu où la population de Champel verra ce genre de manoeuvres...
Un citoyen attristé, déçu par une police qui échappe à tout contrôle et à toute raison (pensez ! comme ils sont fatigués les pauvres...)
Un citoyen qui pour la première fois de sa vie choisit de rester anonyme parce que cette police-là est capable de tout. La confiance est rompue.
Source/auteur : Anonyme
Mis en ligne le mercredi 4 juin 2003, par Ludo