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Le Monde 59e année, N° 18238 vom 16.9.2003

G8 à Gênes : la police lourdement mise en cause

Le rapport officiel sur les violences lors du sommet, en 2001, a été publié

ROME
correspondance

Deux ans après les épisodes violents survenus lors du sommet du G8 qui se déroulait à Gênes, en juillet 2001, le parquet de la ville a conclu à la responsabilité de 73 agents, fonctionnaires et médecins de la police. Formellement, il ne s'agit pas encore d'une mise en examen. Celle-ci est du ressort du juge des enquêtes préliminaires qui prendra sa décision après avoir donné le temps à la défense de demander d'éventuels nouveaux interrogatoires et des vérifications. Mais les conclusions de l'enquête, déposées vendredi 12 septembre, ne semblent guère laisser de place à d'autres issues.

Pendant deux jours, la ville fut le théâtre de heurts entre la police et les manifestants. L'un d'entre eux, Carlo Giuliani, fut tué d'une balle tirée par un carabinier. Les charges retenues contre les policiers concernent le fait d'avoir causé des lésions graves, des abus de fonction et la rédaction de faux documents publics.

Près de la moitié des délits sont en relation avec l'un des épisodes les plus graves, à savoir une descente policière, dans la nuit du 21 22 juillet, à l'école Diaz, où étaient logés 93 jeunes manifestants antimondialisation. Soixante et un d'entre eux furent blessés, tous furent arrêtés. La version officielle de la police parlait d'un agent blessé par un coup de poignard et de la découverte de deux cocktails Molotov. Faux, selon le parquet. Dans les deux cas, les preuves furent fabriquées pour justifier, a posteriori, l'irruption dans l'école.

GAZ URTICANTS DANS LES CELLULES

Les autres accusations portées contre la police se réfèrent aux épisodes violents dans la caserne Bolzaneto, où étaient concentrés les jeunes arrêtés dans les rues. Cinq cents d'entre eux y passèrent pour une vérification d'identité, avant d'être relaxés ou conduits en prison. Tous ont affirmé avoir été battus ou subi une agression verbale.

Dans le rapport du parquet, on trouve des allusions à la diffusion de gaz urticants dans les cellules. Il évoque aussi le cas de jeunes laissés sans nourriture et sans boisson pendant plus de 15 heures, de jeunes filles obligées de rester nues devant des policiers masculins et des traitements définis par les magistrats comme « dégradants » en « violation du code et des droits de l'homme ».

Parmi les responsables contre lesquels sont portées des accusations figure un médecin qui était chargé de coordonner le service sanitaire pour les jeunes arrêtés. Il se voit reprocher des abus de fonction répétés, l'omission de rapports médicaux, des injures, des coups et menaces. Du côté des policiers, trois dirigeants importants, promus après les épisodes de Gênes, sont accusés, entre autres, d'avoir tenté de cacher la vérité aux magistrats.

L'enquête est partie des témoignages de journalistes et d'autres personnes présentes, et s'est basée essentiellement sur des images télévisées et des photos. Les magistrats soulignent cependant que leurs conclusions sont très documentées. La version selon laquelle il n'y aurait eu, à Gênes, que des épisodes isolées de violences provoqués par quelques « têtes brûlées » parmi les policiers est contestée par le parquet. Tous ceux qui sont intervenus à l'école Diaz ou à Bolzaneto étaient au courant que des actes arbitraires avaient été commis. Et la chaîne de commandement savait parfaitement ce qui arrivait.

Le ministre de l'intérieur, Giuseppe Pisanu, a pris la défense de sa police en déclarant, dimanche 14 septembre,qu'« il ne faut pas transformer les agressés en agresseurs ». C'est la ligne suivie, depuis le début, par la majorité de centre droit de Silvio Berlusconi alors qu'à gauche on demande que la justice suive son cours.

Salvatore Aloïse


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